Qu'est-ce que la psychologie environnementale?

La définition de la santé mentale peut se baser sur trois facteurs principaux :

Les facteurs biologiques : ils sont relatifs aux caractéristiques génétiques et physiologiques de la personne.

Les facteurs psychologiques : ils sont classiquement liés à leurs aspects cognitifs, affectifs et relationnels.

Les facteurs environnementaux : ils concernent les relations entre la personne et son environnement.

Si les facteurs biologiques et psychologiques sont connus et étudiés en France, les facteurs environnementaux représentent en quelque sorte le « parent pauvre » de la santé mentale. Au niveau de la recherche, ils font l’objet d’un nombre significativement restreint de publications. Au niveau des formations professionnelles, ils sont bien souvent secondaires face à la psychologie du sujet, qui est centrée sur l’individu en tant qu’entité unique. Pourtant, la psychologie environnementale est une branche vivace de la discipline, génératrice de travaux et de réflexions intéressant tous les champs professionnels. Elle explore les « interrelations entre l’homme et son environnement dans ses dimensions spatiales, sociales et temporelles et les considèrent comme un système caractérisé et indissociable » (Charras et al, 2012). Il n’est donc pas question d’un individu isolé mais d’un ensemble individu-environnement qu’il faut prendre en compte dans sa globalité.

Dans les structures médico-sociales accompagnant des personnes porteuses de polyhandicap, les aspects environnementaux représentent des compléments vitaux aux analyses cliniques des praticiens. La grande vulnérabilité des personnes vivant dans ces structures est en effet essentielle à prendre en considération, notamment dans leur faible possibilité d’action vis-à-vis de ce qui les entoure. Comment ne pas prendre en compte l’environnement immédiat d’une personne qui le subit généralement plus qu’elle ne le choisit ? Comment occulter l’impact d’un environnement idéologique ou culturel, alors même que le handicap mental restreint bien souvent l’expression de la volonté ?

De plus, une structure médico-sociale n’est pas un lieu de prise en charge « classique » au sens d’ambulatoire, mais un lieu de vie où l’accompagnement quotidien est une thérapeutique à lui seul. Ainsi, il nous faut considérer l’idée que ce n’est pas tant un lieu où l’on prend soin, mais bien un lieu qui prend soin de par un fonctionnement propice au bien-être du sujet. Le fait que les personnes soient généralement accueillies à très long terme plaide encore davantage en faveur d’une réflexion approfondie concernant l’environnement et ses effets sur leur vie quotidienne.

Dans le but de présenter succinctement la psychologie environnementale, nous en délimiterons le cadre général. Ce modeste travail n’a pas la prétention de faire le « tout de la question », mais de donner envie au professionnel de structure de s’informer sur ces aspects mal connus de la psychologie théorique.

Généralités sur la psychologie environnementale

Nous l’avons dit, la psychologie telle qu’elle est généralement pratiquée en structure met l’accent sur les variables individuelles des sujets. La psychanalyse, dans sa forme classique, constitue un bon modèle de psychologie du sujet. Cependant, elle n’est pas la seule à s’intéresser aux aspects subjectifs individuels : la phénoménologie, la psychiatrie française, les thérapeutiques humanistes et philosophiques (...) sont autant de méthodes d’accompagnement centrées sur l’individu. L’idée n’est pas de dire que ces théories sont de moindre importance car il paraît primordial de s’intéresser à ce que la personne ressent, pense ou imagine. Cependant, les apports complémentaires d’une réflexion sur l’environnement du sujet ne peuvent que renforcer notre compréhension de son monde matériel et social, et par là des potentiels ajustements d’accompagnement que l’on peut lui proposer.
La psychologie environnementale considère l’être humain dans son milieu de vie. Elle met donc en œuvre une pensée s’intéressant autant à l’individu humain qu’à son milieu.

L’individu est caractérisé dans ce champ par ses propriétés...

- Physiques et biologiques (âge, sexe, génétique, handicap) ;
- Psychologiques (estime de soi, personnalité, aspects cognitifs et comportementaux) ;
- Socioculturelles (rôle, position sociale).

L’environnement, quant à lui, est considéré dans ses propriétés physiques (impact sensoriel, proxémie, etc.) mais également sociales, voire institutionnelles.

C’est dans ce sens que Moser (2003) définit la psychologie environnementale comme « l’étude des interrelations entre l’individu et son environnement physique et social, dans ses dimensions spatiales et temporelles ».

Selon Charras et al. (2012), différents types d’approche existent dans ce domaine de la psychologie :

- L’approche interactionniste : l’homme et l’environnement sont deux entités distinctes liées par des relations de causalité.

- L’approche organiciste : l’environnement est un système complexe mettant en jeu des dynamiques sociales, sociétales et individuelles.

- L’approche transactionnelle : l’individu et l’environnement sont une unité inclusive dans laquelle l’individu et l’environnement sont en constante influence réciproque.

L’approche transactionnelle nous semble particulièrement intéressante à utiliser pour réfléchir sur les aspects psycho-environnementaux de l’accompagnement institutionnel proposé aux personnes habitant une structure de type médico-social. Selon Moore et al. (2003), cette approche explique le comportement d’un individu à partir de ses caractéristiques propres, de celles de son milieu, et enfin du rapport que l’individu lui-même entretient avec son milieu. Nous nous trouvons ici au cœur de l’approche psycho-environnementale.
Dans cette optique, Moser (2003) dira que « l’individu et l’environnement forment un système caractérisé par une réciprocité et un échange continu et dont les éléments ne peuvent être définis séparément ».
Ainsi, dans cette approche, il paraît ardu de considérer la personne poreuse de polyhandicap comme simple récepteur de l’environnement institutionnel. Loin de simplement réagir à son milieu, elle interagit avec lui et le transforme tout autant qu’elle est transformée par lui.
Depeau et Ramadier (2011) parlent en cela de « couple individu-environnement ».

Nous voyons bien que ce type d'approche peut constituer de précieux atouts au sein des structures, en nous permettant de dépasser les réflexions de type causalité au profit d'attitudes plus propices à une vision de l'homme dans sa globalité.